Syndicat National des Fabricants de sucre industrie sucrière SNFS sucreries

200 ans d'industrie sucrière en France

Jusqu'au début du 19ème siècle, on ne connaissait que le sucre de canne. Produit de luxe, il ne fut consommé pendant longtemps qu'en quantités relativement faibles et seulement par les classes aisées. A l'orée du 19 ème siècle, le sucre consommé en France est produit dans les colonies, les "îles à sucre" : Martinique, Guadeloupe, Saint Domingue, et raffiné en France.

1812 - 1914

L'idée d'extraire le sucre de plantes autres que la canne à sucre, la betterave notamment, fait néanmoins l'objet de recherches et va se concrétiser sous les contraintes des guerres napoléoniennes. En 1806, Napoléon interdit d’escale dans les ports français et des territoires contrôlés, tout navire britannique. L'année suivante, le Royaume-Uni institue le blocus continental, en imposant à tout navire à destination de l’Europe continentale, d’escaler au préalable dans un port anglais. Le commerce maritime est stoppé. Napoléon stimule alors les recherches sur la production d'un sucre indigène. La betterave émerge comme la meilleure source de sucre.

En 1811, un Décret impérial charge les Préfets de veiller à la mise en culture de la betterave dans pratiquement tous les départements français. En 1812, un autre Décret impérial met en place des licences de fabrication de sucre de betterave. Ce Décret fonde l’industrie du sucre de betterave en France. Cette production s'effectue alors dans de multiples fermes-usines. En 1814, plus de 200 sucreries de betterave sont en activité.

La production de sucre de betterave cohabite plus ou moins bien avec celle du sucre de canne colonial, qui n'a pas le même régime fiscal avantageux. En 1839, les sucriers coloniaux déclenchent "la guerre des sucres" qui se termine par la loi du 2 Juillet 1843 établissant une égalité de traitement fiscal. Les gouvernements successifs encourageront alors la production de sucre de betterave génératrice de recette fiscale, devenue indispensable à l'équilibre des budgets. Le sucre de betterave, loin de disparaître, a gagné sa légitimité.

 Entre 1840 et 1873, la production de sucre de betterave passe de 27 000 à près de 300 000 tonnes. 

Les fabricants de sucre commencent à s'organiser : en 1867 à Douai, a lieu l'Assemblée Générale constitutive du "Comité Central des Fabricants de Sucre", transformé en 1886 (suite à la Loi sur les syndicats professionnels de 1884) en Syndicat National des Fabricants de Sucre.

De 1874 à 1884, la sucrerie française connaît des moments difficiles du fait de la concurrence des sucres allemands et autrichiens bénéficiant d'un système de soutien favorable. En 1884, la Chambre des Députés vote une réforme fiscale : l’impôt n’est plus assis sur le sucre mais sur la betterave, ce qui encouragera le développement de betteraves riches en sucre et permettra de redresser la situation de l'industrie sucrière française. 

1914 - 1957

Pendant la première guerre mondiale, les sucreries souffrent de très nombreuses destructions. Mais le mouvement de reconstruction qui a suivi a donné lieu à des restructurations : les sucreries reconstruites sont plus grosses et la structure du capital change : de petites sociétés familiales se regroupent sous l'égide d'un seul propriétaire. Entre 1912 et 1927, le nombre de sucreries passe de 213 à 108.

Le niveau de production ne rattrape celui d'avant guerre (soit en moyenne plus de 700 000 tonnes) qu'à partir des années 1930, ce qui engendre alors une crise de surproduction du fait du maintien d'un flux d'importation des colonies. Face à cela, les fabricants de sucre français mettent en place un contingentement volontaire de la production et un financement des exportations, dispositif qui deviendra vite d’ordre public. C'est l'émergence d'une organisation économique et d'une interprofession qui perdureront jusqu'à aujourd'hui.

De nombreuses sucreries sont, à nouveau, détruites pendant la seconde guerre mondiale. Après guerre, dans le cadre du renouveau économique, plusieurs nouvelles sucreries sont construites et certaines distilleries sont encouragées à se transformer en sucreries. La campagne 1953/1954 se caractérise par le nombre le plus élevé de sucreries en activité après la seconde guerre mondiale : 110 sucreries qui produisent près d'1,5 million de tonnes de sucre.

Ce développement de la production de sucre nécessite de remettre en place le système de contingentement et de financement des exportations qui existait avant-guerre, mais avec la participation des planteurs de betterave. Ainsi, l'organisation de l'interprofession se renforce. Le Groupement National Interprofessionnel de la Betterave, de la Canne et des Industries Productrices de Sucre et d’Alcool (qui deviendra plus tard le CIPS) est créé en 1954. Le Centre d’Etudes et de Documentation du Sucre (CEDUS) est créé en 1955. La première convention collective des sucreries, sucreries-distilleries et raffineries est signée le 8 Juin 1955.

Pendant cette période d'après-guerre, l'industrie sucrière et la production de betterave connaissent des progrès techniques et technologiques considérables.

1957 – aujourd'hui

Le Traité de Rome signé en 1957 et la nouvelle Politique Agricole Commune transfèrent la gestion des principaux marchés agricoles, dont le sucre, des États vers la Communauté Économique Européenne. Le premier règlement sucre ou Organisation Commune du Marché du sucre (OCM Sucre) est adopté en 1967. Il reprend les principes de contingentement de la production, sous le terme de quotas, de prix de soutien et d'aides à l'exportation.

 Le règlement sucre s'est adapté aux élargissements successifs de l'Europe, aux contraintes budgétaires, à l'accord de l'OMC de 1994. Ses grands principes d'organisation perdurent encore, malgré les ouvertures du marché communautaires aux importations et la réforme de 2006. Cette dernière a fortement réduit les quotas de production, les prix de soutien et les possibilités d'exportation et encouragé une forte restructuration de l'industrie sucrière en Europe, avec 79 usines fermées sur un total de 183, dont 5 en France sur un total de 30.

Depuis sa création, l'OCM Sucre a favorisé un développement économique important de l'industrie sucrière en Europe et en France. Entre 1960 et 2012, la production de sucre est passée de 2,5 à près de 5 millions de tonnes. Elle a également donné lieu à des mutations du capital de grande ampleur, par fusions. Le nombre de sucreries françaises est passé de 102 en 1960 à 25 en 2012 et le nombre de sociétés sucrières est passé de 84 à 7 (en fait 5 centres de décision).

 

La réforme de la PAC votée en 2013 va mettre fin aux systèmes des quotas et des prix de soutien dans l'industrie sucrière à partir de 2017. Une nouvelle ère va s'ouvrir pour la profession.

Le SNFS a publié en 2012 un livre retraçant les 200 ans de l'industrie sucrière française. Pour se le procurer, merci de contacter le SNFS.